Au même endroit en plein après-midi, un joints à la bouche et jouant aux cartes. On a fait un saut à la plage, c’était blindé de beaucoup de gosses et de vieux, un sable gris pas agréable du tout et des directives bien trop oppressantes. Pas fumer, pas mettre sa serviette dans les passages déterminés par des fils rouges, peux pas. On a préféré rentrer au calme, là où nos serviettes sont pas collées et où on bronze pareil. La Jolla ça nous gagne pas trop, les mecs nous ont dit que c’était un coin de richou et qu’ils avaient eu de la chance de trouver cette maison. On a quand même la vue sur la mer de nos serviettes, et le choix de l’ombre. Un par un, les occupants de la maison sont partis, le mec en école de commerce est allé chasser au harpon avec ses parents qui lui rendait visite. Il a quand même trouvé bon de préciser que la chasse au harpon était interdite mais qu’ils y allaient quand même, tout le monde fait ça. Soit. Demain on part dans les montagnes de Zion, en Utah. On a envoyé un message à Amélia, la pote de Blakely du Yosemite. Elle peut nous accueillir, on n’a pas trop compris où. On envoie des demandes de CS à Austin Texas aussi, pas de mal de s’y prendre un peu à l’avance. C’est notre dernier jour en Californie, ça me rend un peu triste même si y’a pas grand-chose à faire pour en profiter. On avait vu dans le routard un cheesecake restaurant bien annoncé mais bien trop chère, on a du coup pris les mini sandwiches qui nourrissent pas trop. Y commence à faire faim. On sait pas si y’a du monde à l’intérieur et préférons passer par les poubelles pour sortir de la maison. Direction le fast food le plus près qui s’avère être Jack in da Box, qui s’avère être celui que le commercial du midwest trouve le moins pire. Pas de grande différence pour moi, c’est sale à l’intérieur mais la fontaine à soda à pas le gout de javel. Enfaite le Dr Pepper c’est de la roots beer !? Obligé de le couper au fanta pour éliminer le gout de bubble gum affreux. Les gros sacs qui en sont à leurs seizièmes cheeseburgers nous regardent bizarrement, on décompense complet dans le Jacky.
Retour à la big house, businessmann est en train de faire visiter la baraque à sa famille et à sa copine pendant qu’on fume nos grosses roulées sur le balcon. Ils ont l’air d’être une famille correcte, middle class wasp et comme dans les films. Ils s’intéressent à notre voyage et aux concepts du couchsurfing, du fait que nous connaissions Mathiew que depuis hier soir et qu’on soit la sans être inquiété. That means if Mathiew goes to France you have to host him right ? - He can be hosted everywhere he asks, je lui rétorque. Ils enchaînent sur leurs souvenirs d’Europe. Le grand frère est une énorme tête de con et fait passer business pour un quelqu’un de cool, qui a du grandir en se faisant taper par cette grande gueule qui fait toutes les blagues téléphonées dont la famille rigole en cœur insupportables. Mathiew a trouvé une soirée couchsurfing dans un bar de Downtown. Il parait soucieux de nous occuper, c’est touchant. Embarqué dans sa caisse avec son coloc qui ressemble encore plus à un allemand et il se proclame conducteur sans alcool de la soirée. Ça nous va très bien.
On oscille entre nos lecteurs multimédias et le gros électro de l’allemand. On descend à la Jolla pour manger avec les potes de Mathiew, sans lui dire qu’on sort de table. La cantina est dédié au surf, des planches sont accrochées à tous les murs et des télés désynchronisées passent des clips de vagues des années 60. Plein de monde, on se bat pour commander un gros burrito pour deux. Britney est déjà là, une copine de Mathiew aux yeux bleus profonds comme l’océan. Je crois que je la fixe et que sa la déstabilise un peu. Elle se fait vite rejoindre par son copain, une petite gueule qu’a l’air un peu benêt mais pas méchant pour une fajita. San Diego est réputé pour avoir la meilleure bouffe mexicaine des states, je demande si elle est meilleure qu’au Mexique mais pas de répercussions. Je raconte notre voyage aux potes assez nombreux maintenant, je prends un accent bien cutie frenchie et j’essaie de la racler un peu, je sais que ça énerve Edg. Y devrait pas, c’est pas souvent du tout que ça arrive. J’crois que le copain me lance des regards méchants. Quand on va fumer la clope d’après repas, la tablée le prend comme si on se faisait chier. Mathiew nous rejoint dehors avec nos vestes et nous annonce qu’on se barre au bar. On traverse l’agglo de San Diego par la freeway pendant une bonne demi-heure, personne ne connait l’endroit et on se pomme pas mal avant de le trouver. C’est pas notre job, nous c’est la musique et on le fait bien. Je pense que c’est à ce moment que Move Your Feet de Junior Senior devient officiellement la chanson de « quand y’a du monde ». On croise une voiture, la fenêtre s’ouvre et sors la tête du mec de Brit qui cherche le bar en rigolant. On trouve finalement l’endroit, un gentil bar de heavy stoner. Billards, jeux vidéo old school sur rétroprojecteurs et arcades, jeux de société à emprunter.. On prend tous la même bière avec une fée verte sur la tireuse, forte et brassée ici. La salle fumeurs est minuscule et blindé et pour pas paraitre impoli on y va en décalé. Je sais pas si y’a beaucoup de CSeurs présents, un grand tatooé me dit qu’il part à Vegas demain et est tout excité. Je lui propose notre caisse mais il a déjà son ticket d’avion. Les deux turques trop connes qui m’avaient déjà accosté au bar se repointent. Elles ont un anglais dégueu et ne disent que des trucs qui n’ont aucun sens, en rigolant comme des tebé pleines de libido. Elles se branchent avec le grand tatooé et je me sauve. De vraies tempêtes. La tablée joue au Badaboum ricain et a repris une tournée de bières. Edg est à côté de Britney et son copain à l’air pitré. Mathiew pensait surement qu’on serait dans notre élément ici, mais on n’a pas vraiment d’élément, pas de communauté, pas de grandes attentes en générale. On attend le mec de Brit dehors, il est raide et tout le monde se moque de lui, alors je fais pareil. Il sort en pleurant, pensant qu’on l’a abandonné. Brit le prend dans ses bras et ils rigolent ensemble, ils sont heureux. Mathiew veut nous emmener dans son coin favori avant qu’on parte.
On est sur un grand pont en courbe de 3,5km de longueur et qui culmine a plus de 60 mètres. Il franchit la baie de San Diego pour raccorder la ville chicos de Coronado, petite ile en face du Downtown. On s’arrête sur une pelouse au bord de l’eau, entre de petits immeubles, face aux gratte-ciels illuminés de la skyline de San Diego. La vue est belle et paisible, rien ne bouge à l’or de l’acier et du verre. Britney se repose sur le ventre de son chéri et les deux colocs parlent entre eux. On se permet de pisser dans l’eau face à ces symboles d’un monde occidental qui tient en équilibre dans ce type précis de lieu. Finit les bobos de SF, les néohippies des parcs, les étoiles de L.A et enfin la tranquillité de côte d’azur de San Diego. See you California. Sur le pont on voit jusqu’au Mexique. Les colocs n’y sont jamais allés, pas grand-chose à y faire et c’est dangereux, parait-il. On met des chansons d’Alela Diane pour rentrer à La Jolla.
Sans grande motivation, Mathiew nous propose de passer chez sa copine qui fait une fête avec ses potes. Il nous avait jamais parlé d’elle mais on est chaud ! Le coloc allemand veut rentrer chez lui mais on arrive à le convaincre de venir et Mathiew prend une route qui monte sur la colline. La maison fait très bourgeoise, toute blanche d’extérieur et éclairée grâce à des néons multicolores. C’est madame qui nous ouvre et fait un baiser timide à Mathiew, elle et toute petite et blonde, un œil qui dit shit à l’autre et parait un peu nunuche. Sa cousine est moins moche mais se permet donc de parler bien plus et avec beaucoup plus d’assurance. Y’a une quinzaine de personnes sorties directes d’un club, un mec qui envoie du son ocean drive dans des enceintes de qualité très médiocre, mais il s’y croit vraiment. Des filles en chaleur préparent des shooters fluo en se pouffant pendant que les mecs a chemise à fleurs jouent au billard dans le salon. La cousine tire sur le gros bang d’un black habillé en parodie de hustler. Il fait un câlin à son bang. Une pouf nous force à gouter tous ses cocktails bien trop sucrés et je suis obligé de lui lancer mon diabète à la gueule pour qu’elle se calme. On lance un regard à Mathiew et l’allemand qui ont l’air aussi embarrassé que nous. On prend une bière light que l’allemand, fidèle à ses origines, taille pour son mauvais gout. Tout l’est à peu près ici, pas grave. On sort fumer une clope et presque tout le monde nous accompagne. Les seuls vrais fumeurs qu’on rencontre jusque-là. Bonne pub antitabac. Enfin ça crée quand même un moment plus sympathique, y’a une vue de malade de la terrasse, les pentes de la colline, la côte et la pleine lune accompagne bien. Je taxe une blonde à un gangsta-like. Une fille un peu plus ronde et maligne que les autres. Elle essaye de parler français car a passé un an au pair à Paris, sur un coup de tête, sans rien comprendre au français. Elle reste un peu perplexe sur cette expérience, trouve que les parisiens ne sont pas très drôles. Surtout dans le XVIème. Après un an de taff à SD elle a assez de tunes pour se payer cet appart et une formation à l’UCSD. On lui fait tourner notre petit pétard et Mathiew fume un peu aussi. Il essaye de retourner vers sa meuf qui est un peu trop raide et ils montent un petit moment. La cousine est montée avec le hustler, j’ose pas imaginer la connerie des trucs qu’ils doivent se murmurer. Quand Mathiew redescend, on consent tous à se barrer. L’alcool est redescendu et on a une sévère journée demain. On remercie fortement nos hôtes et on se retourne dans notre petit nid.
jour23