Il ne s’est rien passé pendant la nuit, je me réveille avec mon p'tit troudbal entier. Je crois avoir entendu Cedrico faire un aller retour, il est allé au boulot et est dans sa chambre, il revient de la piscine. Il est midi, on émerge doucement dans cette chambre sombre. Cedrico nous laisse le temps, moi j’en ai encore mal au ventre. Il nous propose sa douche, nous demande nos plans pour la journée. On n’a aucun plan pour la journée, on sait rien de la ville, ni de ce qu’on veut voir, ni de ce qu’il y a. Il ne nous croit pas, qu’on ait absolument rien planifié, ni même qu’on se soit un minimum renseigner sur quoi faire ici. On lui explique que c’est pas qu’on s’en fout, loin de là, on laisse venir les choses sans planification, on se laisse couler, on est libre. On propose une balade dans le quartier, qui semble être une bonne idée malgré le temps dégelasse, toujours le même brouillard blanc, cette fois le plancher est un peu plus haut, mais il en est quand même menaçant. On ne fume pas de clopes dans la chambre, Cedrico déteste le tabac et nous indique les escaliers qui donnent sur l’arrière rue de Valencia. Je raconte à Edg mes expériences de la nuit, mon gros coup de flip, et l’amour que je porte à lui. À Edg. On prend une douche respective, je ne parle de rien de spécial avec Cedrico, de la conversation courtoise sur son parcours, j’ai encore mal au ventre, puis on sort découvrir le quartier de Mission.
Marche paisible, Edg commence à philosopher avec Cedrico comme il adore faire. Puis moi je me mets en retrait, les écoutants et quand ça me fait chier, je passe dans ma tête. Les gens qu’on croise sont tous contents, des latinos qui ont le sourire. C’est plaisant, même si y fait pas beau. Un des sujets de conversation qui m’a fait sourire est sur la langue française, Cedrico nous taxe de prétention extrême. On est trop fier de notre langue, on s’en branle pour la plupart de l’anglais et au lieu du please, on ordonne aux gens de nous plaire. S’il te plaît, en relevant le nez, mprf mprf, je te somme d’obéir sous merde. En anglais on vouvoie même pas. Il n’a pas une très bonne image de notre peuple, ça me surprend parce que je pensais que ça allait être l’inverse. Mais peut-être qu’ici ils ont pour la plupart déjà vu Paris. Ceux qui l’on du moins, n’apprécie pas le coté mesquin, pestouille et peu sympathique des parisiens. À Paris on a peut-être l’histoire, mais à SF il y a toute la contre-histoire. Puis quand on pousse des raisonnements comme on le fait ici, ça peut faire chier qu’une Marie Claire qui ricane avec une salle Bénédicte sur le penchant gaffeur de Gabrielle. On arrive à un coffee shop/restaurant, on s’installe dehors et le serveur vient nous parler en espagnol. Je lâche trois-quatre mots que j’ai appris au cours de ma retraite à Séville de l’année dernière et les hispaniques sont tous deux content. Un français qui parle l’espagnol ET l’anglais. Pour me la racler, j’ajoute l’allemand. On dirait que les ricains sont toujours étonnés qu’on parle l’anglais plus une autre langue qu’ils ne connaissent pas, et quand y’en a une troisième on est presque des génies. En même temps eux ils ont pas trop de soucis à se faire dans le monde, et sa les poussent pas à faire des efforts. Edg commande des pancakes et leur accompagnement de délice, moi une pièce de fruits et de crème glacée, et Cedrico un plat chaud a la bouillie de tomate. Faut que je fasse gaffe, j’ai récemment appris que j’avais une forte tendance au diabète héréditaire sans traitements à surveiller et c’est pas ici qu’ils mangent le moins sucré. Bon je vais pas me prendre la tête non plus. C’est très bon, on à même du mal à finir, pas de soucis le serveur apporte une boite pour mettre le reste dedans et on emporte pour finir à la maison. On grille une clope et fait sortir le serveur. Même si on est dehors, pas le droit de fumer dans la zone de devants le magasin. Bon, autre côté du trottoir, y sont quand même pas communs ces ricains. D’une part je suis encore un peu foncedé de la veille, presque légalement, et j’ai pas le droit de fumer une clope dehors. J’pleurniche pas et on continue la ballade.
On arrive aux abords de Castro, l’épicentre des folasses. La rue du même nom est jonchée de shops. On passe devant le célèbre Castro Theater, Cedrico nous embringue dans les boutiques les plus typiques. Une boulangerie avec deux tanches en tablier trop large et nue dessous vendant des croissants en forme de bite. Ils se font des bisous dans le cou et regardent si on est venu pour mater ou pour consommer. On sort et atterris dans le sexe shop typique gay et dégueu. On reste pas, on fait le tour de la rue et atterrit sur l’ancien magasin de photos de sieur Harvey Milk, une plaque en métal est scellée devant. Cedrico veut prendre une photo, je m’allonge par terre et souris à côté de ce mec qui ressemble bien à Sean Penn. Ça me fait rire, c’est un peu forcé, je me rappelais pas forcément que le film se passait a SF, mais ça pouvait être qu’ici. Et c’est le genre de mecs qui valent bien qu’on s’allonge sur le trottoir. Cedrico continue de nous balader. Déjà que je me repose d’habitude sur Edg, là je ne cherche même pas à comprendre où l’on est. Le soleil se pointe et la balade est de plus en plus plaisante. Je paye une glace à Cedrico sur le trajet, je n’en veux pas pour moi, diabète merci. On s’arrête a un autre sex-shop, on est je pense dans les terres de Mission, le truc est moins sale et gay. On se croirait dans une agence de design, très sobre, des produits qui semblent de qualité et inventif, et très esthétique. L’hôtesse est entièrement tatooé, mais bien habillé et pas vulgaire. On n’achète rien, bien sûr. Il fait cette fois carrément soleil et ça fait du bien de le voir, on se sent en vacances et il fait chaud, assez pour qu’on enlève ces putains de veste qui brident et alourdissent les mouvements. N’ayant jamais été axé sur la météo et ses effets sur le corps et l’esprit, je découvre ses vertus irréfutables dans des moments comme ça. On s’engouffre dans une ruelle longue et étroite, entièrement recouvert des deux parts de graffiti tous hyper bien réalisées, voire même artistiques. Cedrico insiste pour nous prendre sur des photos clichées, mais il nous a très bien guidés et ce spot est cool. Il est bien deux heures et on rentre à notre désormais résidence. Il y a un grand salon vide et une cuisine profonde ou le colocataire de Cedrico cuisine. Il est français, et a priori un peu bizarre. On l’entend jouer de la guitare de sa chambre, mais il ne sort pas dire bonjour aux compatriotes. Cedrico garnit le bang, on le tue ensemble, et Edg s’endort. Moi je trouve le temps pour aller me faire dégorger le poireau comme j’en meurs d’envie depuis hier soir, puis je rejoins Edg pour la sieste.
Cedrico nous réveille à 5 :30 pm, nous annonce que la piscine ferme a 6 :30 pm et qu’il veut y aller. Bon, on se sent un peu forcé de le suivre. Il nous active, alors encore sur l’éveil, rempli son bang pour l’avant piscine, il adoore nager défoncer, il doit mieux flotter. Je tire dessus un coup, Edg n’en veut pas. Au réveil, c’est pas ce qui passe le mieux. On part en un quart d’heure, ne pouvant pas prendre le vélo réservé au CSeur vu qu’on est deux, on n’ira pas très vite et ça fait chier Cedrico. Chez nous on aime prendre son temps, ici on n’a pas l’air d’aimer le gâcher. On discute en marchant, a trois de front. Le trottoir n’est pas très large. Un clochard qui en face voit ça, nous gueule dessus, Cedrico s’excuse poliment. On demande quelle était la raison de cette colère, a priori, sa se fait pas de monopoliser le trottoir pour soi ou son groupe, c’est mal vu de marcher en prenant toute la place. Ah, j’y avais jamais pensé, mais oui, on est pas chez nous.. Non loin de là, la piscine. L’entrée est de 6$ par tête, c’est trop marrant de payer en dollars, même si c’est un peu cher pour faire trempette. Une liasse de 5 billets de one dollars est bien plus impressionnante qu’un pauvre billet de 10€. Green Statch. On paye tout en commun avec Edg, en général on retire chacun à notre tour et on essaye de tenir des comptes, c’est plus simple en temps et en moyens et ça nous force à regarder les dépenses et à s’auto limiter. Le vestiaire une grande pièce ou on se change à la vue des autres du même sexe. Le bassin est séparé en trois, ceux qui veulent nager et qui vont vite, ceux qui veulent nager et qui vont moyen vite et ceux qui veulent nager et qui vont pas vite. On prend naturellement la dernière ligne. Le cercle est bien défini, on fait un tour et on s’arrête pour patauger, mais on se fait vite reprendre par le maitre nageur. Apparemment on n’est pas là pour glander. Edg sort, et je continue à faire des longueurs. C’est spécial comme mentalité, l’eau et chaude et pue, et je suis embrigadé dans la fille derrière des mamies qui vont à une vitesse plus raisonnable. Je me pose la question de passer sur le bassin d’à côté, mais qu’est ce qu’il me prend ? Je m’en branle de nager non ? Je finis mes tours imposés durant mes résolutions stupides et vais rejoindre mon Edg sur le vieux banc qui côtoie le mirador du chef scout. Une flopée de nazis en ordre rentre d’un coup et commence leur entrainement de natation. On se fait donc dégager, douche sans gel et à poil, comme à l’armée, puis on se retrouve dehors. Cedrico a trouvé un pote qui pousse son vélo en lui parlant, à nous un tout petit peu. Il est manifestement sur-gay, et a les mêmes positions, non, plus violentes encore que Cedrico à propos des français. On ne fait que les reprendre, des PARISIENS. Il a passé 6 mois dans cette ville et a été profondément blessé des ricanements qu’on lui a adressés dans des cercles de son âge et, d’il le pensait, de même trip. J’suis sûr qu’on le pense tous les deux, en même temps il est petit, gros, mex, a les cheveux très cours et très crépu, teins en blond sale et parle avec un accent gay à sodomiser. Mais c’est pas bien de penser comme ça, je me mets une baffe mentale. Bref, les amalgames sur notre impédance continuent, moi j’ai déjà pas eu la force d’intervenir tout à l’heure, j’vais pas chercher. Mais ce mec est l’exemple d’une jeunesse dorée Califo-mexicain. Il fait un master de sciences sociales à Stanford, comme si l’université la plus privée américaine pouvait comprendre le social. Une année d’undergraduate là-bas doit couter 40 000 $ l’année, sans encore parler du master. Il a déjà voyagé un peu partout en Europe, et dans le monde, pour pouvoir choisir que l’endroit qu’il préfère en dehors de Mexico, c’est SF. Il a beaucoup vu, a l’air de s’être construit dans cette tremblante redéfinition perpétuelle, et donc ne parle qu’avec Cedrico. Quand il lui tend le bang une fois rentré, il le refuse. Finalement il se casse au bout d’une grosse demi-heure, ne nous accompagnant pas pour ce soir. Comme Cedrico nous demande toujours ce qu’on veut faire et qu’on ne sait toujours pas, personne de nous deux n’aimant trop prendre la responsabilité de la décision, on laisse notre guide décider. Et il choisit pour nous une boite à Castro.
On va manger un coup dans un resto mexicain de Mission, qui est très bon. C’est surprenant, en venant aux États Unis je pensais avoir à faire a des hordes de trucs chimiques sucrée et dégueu, enfaite je me rends compte que tout ce qu’on a mangé jusque-là est surprenant et goûtu. Et dépaysant. On est surement bien guidé, et dans la ville des sens, ça ne peut qu’aider. On veut acheter des bières, avant d’aller en boite gay vaudrai bien avoir picolé un peu. Cedrico n’est toujours pas fan de l’alcool, mais on prend quand même un pack de 6 bonnes bières. C’est soit ça, le pack coûte 7$, soit de la Bud light qui fait pas envie. Pas d’intermédiaire. À l’appart, on fume tellement sur le bang que l’on ne finit même pas nos bières. On ne parle pas trop, on a déjà bien parlé dans la journée, un peu fatiguée. Je préfère écrire à Angeline sur Facebook. Elle demande comment on va et je lui raconte sommairement, en ajoutant un peu de prestige à notre début d’aventures californiennes. Cedrico nous prend pour des taupes qui dorment tout le temps, il a peut-être pas saisi qu’on devait être les recordmen du défonçage de jetlag. Puis on est bien foncedé, pas drôle du tout, plutôt dans la critique intérieure des inepties de ce qui défile devant nos globes trop rouges. Et ce soir, on va probablement être servie.
Zipcar prête à la station d’essence qui est à deux pas de la maison, on part en route pour le 440 Castro. Cedrico a pris sa petite pipe en bois et de la weed, histoire qu’on ne tombe pas en panne. On se gare pas loin et on rentre dans l’endroit sombre. De la grosse techno qui fait du bruit et des mecs en marcel fluo un peu de partout. D’ailleurs c’est marrant, sur les rebords du club quatre mecs dansent tout seul comme des acharnées, torse nu, corps bodybuildé, séché et huilé, lunettes de soleil en gros plastique coloré, et sa s’excite. Un d’eux doit faire 1m40, est asiate et est dois avoir particulièrement chaud aux fesses. On chope une bière. L’arrière pièce contient une salle de photos, un décor kitch avec des oiseaux, lampes de chevet en cuir et chaines. On pose au milieu avec Cedrico, il nous ordonne de faire la pose James Bond pistolet en main et l’air dangereux. Même si on trouve ça ridicule on s’exécute, on fait 3-4 shoots et on ressort dehors. On se cale une p'tite pipe, et on re rentre direct dans la salle fumeur. Déjà qu’on est pas fan de clubs, alors dans un qui regroupe le plus grand nombre de gays bizarres que j’ai jamais croisé et qui m’ont jamais maté, foncedé au possible, c’est pas la meilleure des combinaisons. On enchaine les clopes, sa saoule Cedrico qui est allergique à l’odeur de la pièce enfumée et va danser, tout seul. Il a mis un marcel violet/blanc, mais n’est pas là pour choper. Quand on lui a demandé, il a dit qu’il préférait les filles aux garçons, elles sont plus douces. Ici, les mecs ne font pas forcement doux. Un d’eux arrête pas de fixer Edg, il lui touche faussement par erreur la main et lui effleure les fesses. Il est dégouté et on se casse dans la vraie salle. Une meuf me lance une vanne, je m’approche tout contant avec un sourire niais au possible et lui demande de répéter. Elle me fait signe de dégager, je me serai dit la même chose. Faut que j’arrête d’être niais. Je me mets une autre baffe mentale et vais danser sans convictions avec les deux folasses. La chanson qui passe depuis un bon quart d’heure a pour parole récurant un très joli « I want to fuck you in the ass », ça fait rire Cedrico. Une fille est complètement défoncée par je ne sais quoi viens nous voir quand elle nous entend parler français, c’est une rebeue de Marseille qui disparait comme elle est venue. Rebelote, on va se faire une pipe dehors, on squatte la salle fumeurs et un vieil intello nous aborde, fasciné par la France. Son petit copain ou petit cul du soir le rejoint, il nous propose de fumer de la beuh. On dit oui. Il nous dit que la beuh est dans son appart.. Pas grave. On reprend l’envie folle d’aller danser. Cedrico est toujours la, parlote avec les groupes de dance adjacent. Il comprend qu’on en a marre et qu’on veut dormir maintenant. Le couple de fumeurs, en nous voyant partir, réitère leur proposition d’enfumage chez eux. Euh, on montre Cedrico, désolé on est déjà pris. Have a good night!
On passe à l’épicerie, décidément ouvert à n’importe quelle heure de la nuit puisqu’il est bien 2 :00 am, Cedrico doit acheter je ne sais quoi. J’en profite pour choper la brosse à dents à laquelle je ne pense absolument jamais, et des rasoirs. Je ne sais pas pourquoi, les rasoirs, parce que mes poils qui on prit tellement de temps à vouloir sortir commencent enfin à avoir une répartition loin de dense, mais qui sort du ridicule, et c’est l’occasion pour ma gueule d’arrêter de perdre ces 5 ans. Je ne sais donc pas pourquoi j’achète ces rasoirs, acte de candeur où j’y pense juste. L’heure est à la défonce de zombie. À la maison, je ne suis plus rassuré, je laisse la place dans le lit à Edg et m’accapare le Hamac. Il ne râle pas, il sait ce que j’ai vécu. Je tombe vite.
ok, après?